SÉJOUR SUR LA BASE AVANCÉE DE HAO 

PRÉPARATION DU TIR

   L’équipage du « Mirage IV », premier arrivé sur le parking où le personnel de la base était venu nombreux, puis les équipages des deux C-135 F d’accompagnement, furent accueillis par le général commandant les Forces Aériennes Stratégiques, le contre-amiral commandant le Centre d’Expérimentation du Pacifique et le colonel commandant la base avancée de Hao, mais aussi par les « Vahinés » qui leur remirent les colliers de bienvenue, aussi traditionnels que les baisers qui les accompagnent.
La satisfaction était générale.

   Il fallait maintenant préparer le succès de la deuxième phase.
Les travaux spectaculaires qui avaient déjà transformé l’atoll de Hao, encore à l’état naturel en septembre 1964, en une base opérationnelle moderne, continuaient bon train afin d’assurer l’ouverture de la campagne d’essais 1966 à la date fixée, c’est-à-dire au 1er juillet. Et pourtant l’installation du détachement s’effectua dans d’excellentes conditions grâce, en particulier, à l’aide constante et efficace de toutes les unités et de tous les services de la base dont le dynamisme, le sens élevé de la mission et la bonne humeur étaient à l’origine de cette ambiance exceptionnelle qui permit de vaincre tous les obstacles. 

   Les mécaniciens partagèrent un hangar de la zone aéro-portuaire avec leurs camarades de l’escadron « Loire » (équipé de « Vautour » et dont les misions de prélèvements ont été décrites dans le numéro de F.A.F. de février 1967) tandis qu’était aménagé un dépôt de campagne d’armes nucléaires.
Le deuxième Mirage IV, arrivée par voie maritime, ayant été remonté, les dernières mises au point techniques et opérationnelles furent rapidement terminées. Les vols d’entraînement furent mis à profit pour parfaire les liaisons Mirage IV avec les unités du groupe « Alpha » et particulièrement avec le croiseur « De Grasse » à bord duquel le commandant du Groupe Opérationnel des Expérimentations Nucléaires devait diriger les différents tirs de la campagne. Le Mirage IV fut rapidement familier aux Tahitiens de Hao pour qui il devint « l’aiguillette », du nom d’un poisson à la silhouette tout aussi élancée.

   Cette phase de préparation fut rendue délicate en raison de l’indisponibilité de l’un des « Mirage IV » légèrement accidenté à l’atterrissage. Cet accident fut provoqué par la formation brutale d’un brouillard opaque dans la cabine, modifiant la visibilité du pilote de telle manière qu’il ne put éviter de toucher le sol avant l’entrée de piste. Les dégâts, bien que peu importants grâce à la robustesse exceptionnelle de l’appareil, ne permettaient pas d’effectuer la réparation sur place et son retour en France par bateau fut donc décidée.

   Il devenait indispensable, pour assurer le succès de l’opération, que la disponibilité du second « Mirage IV » soit de 100%. Cet espoir n’allait pas être déçu.
Les temps de loisir permirent, après le travail débuté avant l’aube, d’apprécier les ressources des îles polynésiennes qui aident à oublier l’éloignement de l’atoll de Hao, situé à près de mille kilomètres de Papeete. Le séjour fut, pour beaucoup, l’occasion de faire connaissance avec la pêche sous-marine, le ski nautique et la voile et, pour tous, celle d’admirer, à quelques mètres des plages du lagon, à l’abri des requins arrêtés par la barrière corallienne, les magnifiques bouquets de coraux et les merveilleux poissons multicolores. Tous aussi eurent la chance exceptionnelle de pouvoir découvrir les îles de rêve aux noms enchanteurs: Tahiti, Moorea, Bora-Bora.
Mais le jour du tir approchait à grands pas. 

   Le 2 juillet, le premier essai d’engin nucléaire était effectué sur l’atoll de Mururoa avec un succès total. L’atmosphère de la campagne était créée, faite de fièvre, d’impatience, mais aussi de confiance et de fierté.